Les foulées du Mégara

Foulées du Mégara: mon premier semi en Tunisie

Les foulées du Mégara

Invité par l’Office du Tourisme Tunisien, j’ai participé à mon premier semi tunisien aux Foulées du Mégara, et découvert pour la première fois ce pays.

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Vendredi, en fin de matinée, je retrouve Philippe, puis Jean-Pierre et Lionel à l’aéroport d’Orly. Tous les quatre, nous sommes conviés à la grande fête de la course à pied tunisienne qui s’organise à la Marsa, en banlieue de Tunis. Pour arriver à cet aéroport, c’est un peu la galère. Un colis suspect, ou tout simplement oublié par un touriste quand il chargeait le coffre de son taxi, met les forces de l’ordre sous-tension. Circulation bloquée, Orlyval stoppé, il fallait trouver son chemin à pied pour arriver à bon (aéro)port.

Balades touristiques dans la région de Tunis

Après deux heures de vol, changement de décor. Le ciel bleu est déchiré par quelques nuages gris, mais sans nul doute, nous sommes bien arrivés en Tunisie. Nous sommes tout de suite accueillis par Nabil, qui sera notre guide pour le séjour. A peine le temps de sortir les lunettes de soleil, que nous arrivons sur le site archéologique de Carthage. Nabil nous fait voyager dans le temps, entre civilisations puniques, romaines, vandales et byzantines. Les ruines de vestiges romains, thermes, théâtres, amphithéâtres… en imposent encore.

A peine le temps de jouer les touristes et de prendre quelques photos, que nous arpentons les ruelles aux maisons bleues et blanches du village Sidi Bou Said. Le passage devant le Café des Délices nous offre une magnifique vue sur le Golfe de Tunis, laissant notre esprit capturé par le souvenir d’une chanson nostalgique du lieu. Nous passons par le marché, où les vendeurs tunisiens nous abordent pour nous vendre leurs produits. L’échange est calme, pas trop pressant. Les attentats de l’année dernière au Musée du Bardo puis de Sousse ont laissé des traces sur la vie économique et touristique tunisienne, déjà marquée par le printemps arabe amorcé en 2010. Beaucoup de boutiques sont fermées, et les touristes ne se bousculent pas dans les rues étroites du village. Pour nous, cela est plutôt agréable. En tant que touriste, nous sommes bien accueillis, toujours avec attention. C’est plaisant. C’est sûr, visiter la Tunisie en ce moment est des plus agréables, alors que la sécurité n’a rien à envier celle des villes d’Europe.

Le soir, nous dînons avec Riadh Ben Zazia, l’organisateur des Foulées du Mégara. Pas besoin de bousculer ce passionné pour en savoir un peu plus sur ce 8ème rendez-vous sportif. Nous en apprenons plus sur le parcours du semi, qui nous promet d’être vallonné. Sur le 5km de la Marsoise, ce sera très festif. Le ministre des sports tunisien sera lui même en baskets! Bref, nous avons hâte!

Footing sur la plage tunisienne

Le lendemain, après une bonne nuit de sommeil et un réveil matinal par un footing sr la plage, nous prenons notre petit-déjeuner dans un hôtel presque inoccupé. Puis, nous nous dirigeons vers un autre lieu riche d’histoire: Oudhna. La météo est un peu capricieuse, et le vent souffle (il paraît que c’est la tempête en France). Le site, situé à une vingtaine de kilomètres de Tunis, est impressionnant. Mais le vent nous rend fou. D’un commun accord, après le déjeuner, nous rentrerons à l’hôtel. Nous passons tout de même par l’aqueduc de Zaghouan avant de nous diriger vers La Marsa, pour le retrait des dossards des Foulées du Mégara.

Pour la première fois cette année, le dossard est payant (1€50), légitimé par la mise en place de puce sur le dossard, et ainsi permettre aux coureurs de bénéficier de leur chrono réel. Autre innovation: la mise en place de meneurs d’allure.

Retrait des dossards des foulées du mégara

Brice, correspondant pour Running Mag, nous rejoint dans la soirée. Pour lui, pas de course, son dos en a décidé autrement. C’est sur le bord de route, armé de son appareil photo, qu’il participera à ces Foulées du Mégara.

Foulées du Mégara: jour J

Nous arrivons à La Marsa 1h avant le départ. Le monde est déjà là. Je discute un peu avec les deux français de Chronosphère qui s’occupent du chronométrage de la course. Puis je fais connaissance avec Fethia, une jolie dromadaire qui prend également le départ de la course (et uniquement le départ).

Pendant ce temps, une banderole est tirée en mémoire des victimes de l’attaque terroriste qui eu lieu quelques semaines plus tôt dans le sud tunisien. Avec Philippe, nous nous rendons sur la ligne de départ. Nous avons perdu Jean-Pierre et Lionel. L’hymne national est entonné, voire chanter dans son intégralité. Philippe et moi nous souhaitons une bonne course; le compte-à-rebours est lancé. 5, 4,3, 2, 1…

Situés à moins de 5 mètres de l’arche, je lance mon chrono au moment de franchir la ligne de départ. Puis nous nous élançons sur le côté gauche de la route, afin d’éviter les coureurs les moins rapides partis devant nous. Le premier kilomètre est vite avalé, annonçant le début du premier faux plat. Le soleil cogne déjà. La stratégie est simple, ne pas courir trop vite, pour ne pas me griller pour le marathon de Paris que je cours la semaine suivante; ne pas partir trop vite pour ne pas me griller pour la fin du parcours en montagne russe.

Pour Philippe, c’est un peu plus dur. Il a encore les 80km de l’Ecotrail de la semaine précédente, et le temps de récup’ n’a pas été suffisant pour qu’il soit en pleine possession de toutes ses capacités de coureur. Si cela est plus dur pour lui que pour moi, nous faisons tout de même la route ensemble. Notre allure varie au gré des montées et descentes entre 4min13/km et 3min46/km.

Nous passons devant l’architecture impressionnante de la Mosquée Malek Ibn Anas de Carthage. Elle annonce une belle petite descente qui permet de prendre un peu de vitesse. Un peu plus loin, c’est une épingle que nous devons emprunter. Au retour, nous croisons nos poursuivants. Nous saluons d’abord Lionel; qui nous promet de nous rejoindre, puis Jean-Pierre qui nous fait soigne de la main, tout sourire.

Soudain, plus loin, à l’endroit où le retour de la portion du parcours se sépare de m’aller, un coureur coupe. Il se fait huer par les autres participants. J’ accélère alors pour le mettre à sa hauteur et je lis son numéro de dossard. Je lui dis que je vais le dénoncer pour tricherie à l’organisation et il est alors surpris. Il se défend, le dit qu’il n’a pas triché; je lui réponds que je l’ai vu et que je ne suis pas le seul. Dans tous les cas, cet échange le ralentit fortement. La tête innocente du gars me surprend, il semblerait que couper ne soit une forme de tricherie par ici, ou tout simplement qu’il s’agit juste une stratégie de course…

Je ralentis un peu pour attendre Philippe, que j’avais distancé par mon accélération précédente. J’attaque le premier ravito où les bénévoles sont extras. Depuis le début de la course, j’ai soif et mal au crâne. Il faut que je boive. Je prends deux gobelets a que j’arrive à boire par petites gorgées.

Nous entamons alors la grande ligne droite de 8km. Il s’agit d’une grande double voie sur laquelle la circulation n’est pas coupée. Mais peu de voitures circulent et les autorités régulent la circulation aux carrefours, avec bien entendu la priorité aux coureurs.

Philippe me rattrape après avoir franchis le seul pont de cette portion. La file des coureurs est très étirée mais nous doublons sans cesse des coureurs. Ceux-ci semblent être partis bien vite.

A un moment, je double un coureur. Celui-ci ne se laisse pas faire en accélérant, mais sans changer d’allure, je finis par me positionner devant lui. Cela ne semble pas lui plaire. Ce dernier se met à accélérer, me double, se met juste devant moi et ralentis fortement et soudainement son allure. Je suis surpris et j’arrive à l’éviter de justesse, tout cela sous les yeux de Philippe, qui ricane d’incompréhension.

Nous courons à une allure régulière de 4min12/km. Du centre de la route, nous passons sur le côté droit de la double voie. Nous doublons toujours quelques coureurs.

A l’approche du KM12, un premier coureur nous double. J’entends d’abord Philippe lâcher un « Allez Ronaldo », en référence au marquage dans le dos sur le t-shirt de foot. Je l’encourage aussi lorsqu’il me passe devant.

Un peu avant le « rond point à bateau », Ronaldo me ralentis et se retourne pour me demander la distance que nous avons parcourue. Nous sommes au KM14, les montagnes russes vont commencer. Brice est posté sur le côté et il me prend en photo sans se rendre compte que c’est moi. Nous passons sur le tapis de course qui valide notre passage et Ronaldo dit que nous allons faire la course ensemble et nous soutenir.  J’accepte avec plaisir.

image

Je me retourne et je vois que Philippe a déjà été un peu distancé. Je prends un peu d’eau au second ravitaillement du parcours, cette fois 3 gobelets: 2 pour m’hydrate et un pour me rafraîchir la tête et la nuque.

Les choses sérieuses commencent. Un mur se dresse devant nous. Comme dirait John Snow, il va falloir aller au-delà du mur. Je ralentis alors en réduisant l’amplitude des foulées mais sans réduire la cadence. Je monte plutôt facilement mais je ventile fortement pour être sûr de ne pas trop griller les jambes. C’est la nuit et le jour au niveau des sensations par rapport à mon Ecotrail 80km avorté de la semaine dernière.

Nous doublons de temps à autre un coureur, mais la distance entre chacun des coureurs doublés est de plus en plus importante. Nous courons en cadence, et le bruit des pas sur le sol rythme notre course. Mon compagnon de course avoue avoir mal aux pieds. Je ne suis pas étonné, il court comme beaucoup d’autre coureurs avec des chaussures lifestyle et des grosses chaussettes classiques. Je lui dis que c’est normal, qu’il faut continuer et serrer les dents. Après tout, nous avons fait 16km et la ligne d’arrivée n’a jamais été aussi proche.

Nous courons en silence maintenant. Je sens que mon collègue en a marre. Il me demande régulièrement la distance qu’il reste à parcourir. Néanmoins, il garde le rythme. Une nouvelle grosse côte se profile. Nous doublons en premier coureur, puis un second qui marche. Mon compagnon du jour galère. Je l’encourage et je lui dis d’accélérer dans la descente. Il semble vraiment avoir mal au pied le pauvre.

Nous prenons un peu d’eau avant la dernière ascension. Je l’encourage pour qu’il avance. La pente est longue est tout en avançant plusieurs mètres devant lui, je lui crie que c’est bientôt fini, qu’il ne faut rien lâcher. Une fois la pente avalée, je me dis qu’il va pouvoir relancer. Mais il se traîne derrière. Je décide de l’attendre. Une fois qu’il est à ma hauteur, je lui mets la main dans le dos et je le pousse pour le forcer à accélérer. Il reste moins de 800 mètres. Notre accélération est rapide et il perd à nouveau toute énergie. Je lui montre que nous sommes sur la dernière ligne droite, qu’on y est. Et là, il se met à accélérer et à accélérer, me distançant de quelques mètres. Heureusement que j’ai les jambes de feu. J’accélère à nouveau, je reviens à sa hauteur et le passe, tout cela devant une foule en délire, et à presque 22km/h. Je franchis la ligne à la 36ème position, après 1h26min30 de course.

Sprint d'arrivée

Riadh m’accueille et me félicite. Je me retourne et j’accueille mon partenaire de mi-parcours par une accolade. Pas le temps d’échanger un mot qu’il disparaît aussitôt. Riadh me prend par le bras et me demande si je veux bien répondre à une interview pour la TV tunisienne. J’accepte volontiers. Puis c’est au tour de Philippe, qui arrive 2 minutes après moi. Pendant ce temps, Lionel et Jean-Pierre arrivent ensemble, en un peu moins de 1h32.

Après avoir attendu notre chauffeur, nous nous prélasserons à la piscine de l’hôtel et nous récupérerons par des footings sur la plage. Qui parle d’insécurité en Tunisie? De nous jours, pas plus qu’ailleurs en Europe.

Les résultats du semi des Foulées du Mégara: http://chronospheres.fr/evenements/detail_resultats/Les-foulees-du-MEGARA-46/173
L’article de Brice dans Running Mag: http://www.runningmag.fr/evasion.html

Le récit des blogueurs:
– Philippe – https://jahom.wordpress.com/2016/03/29/les-foulees-du-megara-2016-ont-fait-courir-la-tunisie/
– Jean-Pierre: https://runreporterrun.wordpress.com/2016/03/30/foulees-du-megara-la-tunisie-court-pour-sa-liberte/
– Lionel: http://joliefoulee.fr/2016/pour-5-dinars-de-plus/

Remerciements:

Merci à l’Office du Tourisme Tunisien pour les conditions d’accueil et de découverte du pays, à Riadh et toute l’organisation des Foulées du Mégara pour leur sympathie, leur gentillesse et une course au top, à Nabil qui nous a transporté par ses récits et nous a bien faite rire par son humour piquant, et à Jean-Pierre de m’avoir intégré dans ce voyage.

12 commentaires

  1. Pingback: Les foulées du Mégara 2016 ont fait courir la Tunisie | Jahom, runner

  2. Chanceux de faire des voyages comme ça ! Belle performance aussi !

    • Greg Runner

      C’est vraiment une chance, effectivement. J’ai su l’apprécier!! 😀
      Et j’étais content de retrouver mes jambes!

  3. Tu ne t’arrêtes jamais longtemps toi ! Tu aurais pu courir ce semi en mode découverte mais non… en même temps, cela montre que tu as bien récupéré depuis l’Eco… sympas les photos !

    • Greg Runner

      Pourquoi veux-tu que j’arrête?!!!… 😀
      J’étais en mode découverte. J’ai d’ailleurs sur ce semi 5 pulsations de moins en moyenne que sur le semi de Paris!!
      Et effectivement, j’avais bien récupéré!
      Brice a effet fait de magnifiques photos… Encore merci à lui!

  4. beau récit de course, j’ai adoré votre esprit compétitif sain qui résume ce que doit être une vrai course conviviale! les foulées du mégara ont été mon 1er semi j’ai pu terminer la course en 2h20 (record pour moi étant habituée aux petits 5 ou 8 km du quartier..) , je découvre donc le monde du running c’est un plaisir de lire vos expériences

    • Greg Runner

      Merci pour votre message! Et un grand bravo pour votre course. C’est le début de votre grande aventure de Runner!

  5. Merci Greg pour le partage, bienvenue en Tunisie, la seule course en Tunisie actuellement que je recommande fortement.

  6. Mounira Manal

    J’aime beaucoup votre article qui alterne notes techniques et suspens: votre compagnon d’un jour qui souffre mais qui finit par accélérer donne une dimension humaine et humaniste à la course…oui, les grosses chaussettes et les chaussures lifestyle….et encore, vous n’avez pas vu les gamins dans les régions reculées courir en espadrilles, si ce n’est pieds nus. A la prochaine en Tunisie! Un autre semi à Ghar el-Melh, le week-end du premier mai, est très couru par les français aussi…

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